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La confiance aveugle dans le futur
fait place à une attitude de méfiance, de scepticisme et de rejet des solutions
proposées par la classe politique. Le chômage, la précarité, l'exclusion, la violence,
la difficulté à vivre, les inégalités entre les riches et les pauvres, la dégradation
accélérée de l'environnement interpellent tous les acteurs de la société. L'avenir de
l'homme dépasse les frontières des pays, il est lié à celui de la planète.
Le sort des générations futures se prépare aujourd'hui. Les habitants de la planète
ont un combat commun à livrer contre l'injustice, l'iniquité et la destruction de
l'environnement. Comment assurer des conditions d'existence décentes aux 9 à 11
milliards d'habitants de la planète du siècle prochain si le support de la vie, la
Terre, est détruit.
La planète est en danger. Le credo n'est pas nouveau. Les écologistes le crient sur tous
les tons depuis plusieurs décennies. Les philosophes et intellectuels s'inquiètent de la
montée des intégrismes, du recul des droits de l'homme. Les politiciens courent
derrière un monde en mutation permanente. Les scientifiques et ingénieurs rejettent
toute responsabilité dans les changements du monde. Les économistes tentent de reculer
l'heure de la terrible crise. La machine économique libérale fonctionne pour elle-même,
s'autoalimente, et détruit toutes les oppositions.
L'observateur vigilant s'aperçoit aisément que les dirigeants politiques et économiques
nous cachent la vérité. Le fossé entre les pays industriels et les pays en
développement ne cesse de s'agrandir. Les pauvres sont plus pauvres aujourd'hui qu'hier.
Un milliards d'habitants n'ont pas accès à l'eau potable, 40 000 enfants meurent
chaque jour de faim ou de maladies rendues plus meurtrières par la sous-alimentation de
malnutrition, plus de la moitié des 4,1 milliards d'habitants des pays en développement
n'ont pas accès à un minimum d'instruction.
De leur coté, les pays industriels poursuivent leur course vers plus de richesse.
Productivité et croissance sont les maîtres mots et tiennent d'idéologie. Le nombre des
exclus, parmi les 1,3 milliard d'habitants des pays industriels, ne cesse de croitre. La
colère gronde. La société à deux vitesses n'est pas acceptable. ? La richesse
doit être partagée » clament les laissés-pour-compte.
La chute du mur de Berlin, en novembre 1989, mit fin à trente années de guerre froide.
Un immense espoir s'est propagé sur toute la planète. Enfin les centaines de milliards
de dollars engloutis chaque année dans des armements devenus inutiles pourraient être
utilisés pour le développement humain. Pas si simple. Les gouvernements de pratiquement
tous les pays comblent les déficits nationaux et remboursent leur dette avec cette manne.
Les exclus des pays industriels et les pauvres des pays en développement attendent
toujours une amélioration de leurs conditions d'existence.
Le nouvel ordre mondial, claironné par les tenants de l'ultralibéralisme au début des
années 1990 a fait long feu.
La mondialisation des échanges économiques et culturels, l'extrême mobilité des
personnes, la rapidité de l'information donnent l'illusion que tous les habitants de la
planète vivent aujourd'hui la même aventure. C'est loin d'être le cas. Il existe de
nombreuses zones sur la planète qui sont devenues des "Terra Incognita",
interdites aux étrangers si grande est la violence. Elles sont à rechercher en Afrique
ou en Asie, dans nos banlieues. Les ghettos de toutes les grandes villes du monde offrent
le triste spectacle du rejet.
La pollution de l'environnement a changé d'échelle en quelques décennies. La planète
toute entière est menacée par la destruction de l'ozone stratosphérique et par les
modifications climatiques consécutives au réchauffement de la terre. La non-maîtrise de
la croissance de la population conduit le système économique mondial à produire de la
nourriture hors de portée des écosystèmes. L'adoption par la planète entière du
modèle de surconsommation des pays industriels accélère l'épuisement des ressources
naturelles, accroît la pollution mondiale, détourne tous les capitaux disponibles.
L'économie mondiale basée aujourd'hui sur le système libéral n'a pas intégré que les
ressources naturelles disponibles sur la planète étaient limitées et que les capacités
des écosystèmes à absorber les déchets l'étaient également. Le système libéral n'a
aucune vision de long terme. Les ressources énergétiques non renouvelables comme le
pétrole et le gaz se raréfient, les gisements de minerais facilement exploitables
s'épuisent.
L'avenir de la planète est menacé. Pour les pays industriels, la cause principale est la
surpopulation des pays en développement. Pour ces derniers, la menace provient du niveau
de surconsommation des pays industriels. L'attitude manichéenne est absurde. La recherche
du bouc émissaire est irresponsable. Les 5 milliards et 450 millions
d'habitants sont coresponsables du futur de la planète. C'est l'affaire de tous.
Les scénarios catastrophes élaborés, au début des années 1970, par l'équipe de
Donella et Dennis Meadows du Massachusetts Institute of Technology à la demande du Club
de Rome et réactualisés en 1993 prédisent le pire si le cap suivi n'est pas
radicalement modifié. La croissance exponentielle de la population, de la pollution, de
la production agricole et industrielle et de la consommation des ressources naturelles
conduisent au chaos social et met en danger l'aptitude de la planète à supporter la vie
humaine. L'échéance se rapproche inéluctablement puisqu'aucun changement radical n'a
été opéré. Les premiers signes de la crise mondiale sont d'ores et déjà visibles.
L'écroulement du système planétaire pourrait se produire entre 2010 et 2020.
Des alternatives existent, éviter l'effondrement total est possible. Le futur durable
pour tous est à la portée de la main. Il s'agit de ne plus se tromper de priorités et
de les affronter toutes en même temps avec la même énergie et détermination.
A l'échelle mondiale, les priorités des réflexions et des actions doivent porter
simultanément sur 5 secteurs essentiels, à savoir la production de la richesse, la
pollution, la population, les ressources naturelles renouvelables ou non renouvelables, la
satisfaction des besoins alimentaires et l'accès à des conditions d'existence décente
pour tous les habitants de la planète. Aucun des secteurs identifiés comme essentiels ne
doit être traité à part et isolément. Chacun d'eux interagit avec les autres.
L'approche globale et intégrée est nécessaire pour élaborer des solutions viables à
long terme.
Bien qu'immenses, les défis sont à notre portée, il s'agit de stabiliser le plus
rapidement possible la population mondiale et ne pas dépasser les 9 et 11 milliards
d'habitants prévus pour le siècle prochain, de changer la contenu de la croissance, de
stopper la dégradation de l'environnement, de préserver la biodiversité, de partager
les richesses produites, d'abandonner le nucléaire civil et militaire, de satisfaire les
besoins élémentaires de tous les habitants de la planète. Le développement humain
durable est le défi à l'aube du nouveau millénaire.
La société se caractérise par l'incertitude et la rapidité du changement. La
résolution de la problématique mondiale passe par la démystification de l'apparente
complexité de la situation. Les décideurs politiques et économiques se réfugient
derrière la complexité pour éviter l'analyse et affronter la réalité. Le public et
les citoyens demandent des comptes, ils savent que la poursuite du développement actuel
conduit à l'impasse. Le débat sur l'avenir de la planète est demandé par tous. Les
hommes politiques à chaque élection se contentent d'endormir les électeurs et
repoussent ainsi à plus loin le débat sur les dramatiques échéances qui ne font que se
rapprocher inexorablement. Les hommes politiques jureraient-ils le public incapable de
comprendre les défis du futur ? Ne serait-ce pas plutôt l'inverse, ce qui expliquerait
la perte de crédibilité des hommes politiques à travers la monde ?
Rien de durable ne sera possible sans que la paix mondiale ne soit assurée. Les Etats
devront accepter de se dessaisir d'une partie de plus en plus importante de leurs
prérogatives nationales. La paix est l'affaire de tous et pas uniquement de quelques pays
puissants. Il revient aux organisations internationales de préserver la paix, de
prévenir tous les conflits qu'ils soient internes aux pays ou internationaux. La paix
mondiale durable est une priorité absolue. L'Organisation des Nations unies en se
réformant retrouvera l'autorité pour se doter des instruments nécessaires à cette
mission. L'ONU s'appuiera sur des entités régionales fortes pour désamorcer tous les
conflits. Les entités régionales regroupent les pays partageant les mêmes intérêts
économiques et politiques. L'Union européenne est un exemple de ce que seront les futurs
regroupements régionaux.
L'une des tâches vitales pour la paix mondiale est d'arrêter les risques de
prolifération nucléaire, le nucléaire doit être déclaré illégal.
Des peuples de tous les continents souhaitent mettre en place dans leur pays des régimes
politiques établis sur des principes de droit. Parallèlement aux élections qui sont le
premier pas vers la démocratie naissent des institutions civiles fortes : syndicats,
associations, organisations non gouvernementales, organisations populaires, communautés
religieuses, groupes professionnels. Le rassemblement spontané des gens autour
d'intérêts communs qu'ils soient sociaux ou économiques, cimentent la démocratie.
L'explosion mondiale du désir de davantage de participation aux décisions politiques est
favorisée par l'accès à l'information. Ce mouvement est irréversible et sera amplifié
par de nouveaux moyens de communication. La démocratie directe est en préparation. Le
droit des minorités à exister sera renforcé.
La destinée de la planète est l'affaire de tous. Les habitants de la terre ne souhaitent
plus être exclus des décisions fondamentales qui conditionnent leur avenir et celui des
générations futures. Réussir la ? Bataille pour la Planète » exige le
renforcement des valeurs fondamentales partagées de tolérance, de solidarité humaine,
de droits de l'homme et de dignité humaine.
Ce livre est une contribution au débat qui s'amplifie à travers la planète pour
l'établissement d'un véritable développement humain durable. Il s'adresse à tous ceux
qui s'interroge sur le devenir de la société planétaire, et en particulier aux jeunes. |